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LES REMPARTS DE DIEPPE (Seine-Maritime)
Photo ci-dessus de Gilloudifs en 2022.
Au 14e siècle, « A cette époque, le port ou hâble avait son entrée entre la Tour aux crabes et la falaise du Pollet, là où se trouve aujourd'hui le débarcadère des paquebots de Newhaven.
La mer montait très loin dans la vallée, jusqu'aux ports d'Archelles et de Machonville, près Arques, dont parlent de très anciennes chartes. La ville flottait alors comme une île au milieu des eaux. Le Pollet était divisé en deux parties, l'une appelée le Pollet de Dieppe, l'autre le Pollet d'oultre-l'eau. (...)
Le Pollet d'oultre-l'eau (Pollet actuel) n'était pas alors réuni à la ville par le pont fortifié que représente la vue de Dieppe, gravée par Mérian, au 17e siècle, vue qui donne l'aspect du vieux Dieppe, du côté de l'arrivée par la falaise du Pollet ou par Neuville. Les voitures passaient à gué la rue des Wés, aujourd'hui rue d'Ecosse. Le seul moyen de traverser le port était un bateau passeur, placé en face du collège actuel, et qui souvent, à marée basse, ne pouvait passer.Au centre : 1650-Dieppe seine-Maritime Gravure estampe cuivre clés Merian gravure. Dessin à droite : Veüe de la Ville, et du Chasteau de Dieppe. désiné du costé de la porte de la barre // 1699 : [dessin] / [Louis Boudan http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b6902605m
A gauche, plan de Dieppe au 16e s., M. Méry, médiathèque de Dieppe extrait de http://books.openedition.org/puc/9448; au centre, Dieppe au 17e, plan anonyme – médiathèque de Dieppe, extrait de http://books.openedition.org/puc/9448
(…) Ce fut seulement en 1511 qu'on posa la première pierre du pont, dont les six arches reposaient sur de gros piliers dont la construction, dans ce terrain vaseux, occasionna de longs et coûteux travaux. On fortifia ensuite les deux têtes du pont, surtout du côté de la ville. En 1591, on établit, du côté du Pollet, un grand ravelin fortifié qui est figuré sur les plans du 17e siècle, et qui fut démoli en 1689 pour pratiquer un passage en droite ligne du pont à la grande rue du Pollet.
Vue n°2 : Porte de la Barre A. Bichebois Ainé 1830 Fonds ancien et local Dieppe ; vue n°5 : William Clarkson Stanfield, La place de la Barre à Dieppe en 1838
La ville était entourée de fortes murailles, percées de plusieurs portes, dont la porte de la Barre, située en face de la route de Rouen, et celle du port de l'Ouest qui, refaite au 16e siècle, est aujourd'hui le dernier vestige de l'ancienne enceinte du côté de la mer.
Cette enceinte murale est assez exactement reproduite dans le plus ancien plan de Dieppe, qui a pour titre : le Pourtraict de la ville de Dieppe, et qu'on trouve dans la curieuse cosmographie dite de Munster, augmentée par François de Belleforest. (…) il faut notamment retrancher de ce plan le vieux-château, qui n'existait pas en 1430, et dont les tours principales ne furent construites sur la falaise qu'en 1435, par le capitaine Desmarets dont nous avons parlé plus haut. Mais, non loin de l'emplacement où s'élève cette forteresse, on voyait alors l'église Saint-Remi, la plus ancienne de Dieppe « ecclesiam supra mare sitam. » Sa tour du 14e siècle, bâtie en manière de forteresse, plutôt que d'église, fut conservée et reliée aux autres ouvrages du château. On la reconnaît encore aujourd'hui à son architecture sévère et à ses ogives aveugles qui accusent sa première destination. Elle apparaît nettement dans l'extrait du plan très rare d'Israël Sylvestre, que nous joignons à ces notes d'archéologie dieppoise, et qui reproduit l'enceinte murale du côté du midi, ainsi que la porte de la Barre où aboutissait l'ancienne route de Rouen. » [1]
Ci-dessus à gauche, bombardement et destruction de la ville de Dieppe en 1694 par les flottes anglo-hollandaises. Estampe.
Bombardement de Dieppe en 1694 :
« Le bombardement de Dieppe, également connu sous le nom de « bombarderie » de Dieppe dans les sources de l'époque, est un épisode de la guerre de la Ligue d'Augsbourg au cours duquel une flotte anglo-néerlandaise bombarde la ville de Dieppe, les 22 et 23 juillet 1694. Un incendie se déclare et détruit une grande partie de la ville. Les Anglais se dirigent ensuite vers le port du Havre, qu'ils bombardent également.
Après l'abandon du projet de l'ingénieur Peironet de reconstruire la ville dans la prairie de Bouteilles, Vauban dresse un Plan Corigé des Rües de Dieppe. Finalement, la ville est progressivement reconstruite selon les plans de M. de Ventabren entre 1694 et 1720. Cette architecture a laissé son empreinte dans Dieppe aujourd'hui. » [5]
Plan hypothétique des remparts de Dieppe ; blason de Dieppe par Chatsam — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=10348751
"Le Pourtraict de la ville de Dieppe", par François de Belleforest (1530-1583), 1575. Gravure sur bois. François de Belleforest, cosmographe, est l'auteur de la plus ancienne vue de Dieppe. Elle est extraite de son livre "Cosmographie universelle", publié en 1575. Cette vue de la ville, prise depuis la mer, est riche d'enseignements sur les édifices, les portes de l'enceinte fortifiée, l'entrée du port, le château. Rouen -Archives départementales de Seine-Maritime http://archexpo.net/fr/contenu/pourtraict-de-la-ville-de-dieppe
Ci-dessus, Dieppe en 1650 : http://www.xgille.net/#!Dieppe%20en%201650/zoom/cjg9/dataItem-ig3vy7mz
Deux gravures ci-dessus de Dieppe par M. Merian, Frankfurt, 1657
Le château de Dieppe
« Construit pour assurer la défense de la ville, le château fut bâti sur le rebord de la falaise ouest dominant la ville d'une trentaine de mètres. Jusqu'en 1789, il sera le siège du pouvoir royal, représenté par le gouverneur/capitaine qui aura le commandement de la garnison chargée de défendre la ville.
L'origine du Château de Dieppe divise cependant les historiens. D'après les textes, il fut certainement construit sur les vestiges d'un château sommaire édifié par Henri II Plantagenêt et Richard Cœur de Lion, puis détruit par Philippe Auguste en 1195.
Ce qui est certain aujourd'hui, c'est que la trace la plus ancienne est constituée par la tour ouest (donjon), dont l'origine formelle a été située au 14ème siècle, vers 1360, lorsque l'on construit une enceinte fortifiée autour de la ville, menacée par les Flamands alliés aux Anglais.
L'occupation Anglaise le fortifie
En 1435, après avoir délivré la ville de l'occupation anglaise, le capitaine Charles Desmarets obtint l'autorisation d'agrandir la place. Trois autres tours sont construites tandis qu'une tour carrée munie d'un pont levis est édifiée pour protéger l'entrée au sud-ouest. L'ensemble sera également relié à l'enceinte urbaine.
Chaque époque apporta ensuite des modifications ou des restaurations.Dans la première moitié du 16e siècle, une campagne de renforcement défensif est mise en œuvre pour répondre au progrès de l'artillerie. Une barbacane de plan en fer à cheval est construite pour défendre la façade d'entrée du château (sud-est), ainsi qu'une nouvelle tour détachée au pied du château et reliée à l'enceinte urbaine (vers le square du Canada). A la fin du 16e siècle, une tour carrée est édifiée au sud tandis que l'enceinte est prolongée dans la même direction, pour intégrer la tour Saint Rémy de l'église désaffectée puis, du côté ville afin de créer une grande terrasse au sud-est, devenant basse-cour.
Construit au départ comme une forteresse destinée à résister aux assauts d'un ennemi rapproché, le château évolua au 17e siècle vers un autre rôle : celui de résidence et de caserne. De larges et hautes fenêtres sont alors percées, des toitures en poivrières couvrent les terrasses des tours et courtines et des aménagements résidentiels sont effectués pour les gouverneurs et leurs hôtes de marque. La cour où se trouve l'entrée du musée acquiert à l'époque une fonction d'apparat. Une caserne pour loger les troupes est édifiée en 1630 contre la muraille sud-ouest, à l'emplacement de l'actuelle salle d'exposition temporaire du musée.
Photo ci-dessus de Gilloudifs en 2022
Photos ci-dessus de Gilloudifs en 2022.
Prison révolutionnaire
La Révolution française aurait pu ensuite nous priver de ce prestigieux vestige, s'il n'avait pas été transformé en geôle pour y enfermer les contre-révolutionnaires. En 1829, Dieppe fut déclassée comme place de guerre, à l'exception du château. En 1906, la Ville racheta l'édifice à l’État. Classé Monument Historique en 1904, il redevint place militaire pendant la première Guerre Mondiale.
En 1923, on y transféra le musée municipal, créé en 1897. Il devint alors le Château-Musée. Le projet initial était de constituer un musée des beaux arts destiné aux ivoiriers dieppois et aux résidents en villégiature. En 1930, la statue de Vauquelin, réalisée par le sculpteur dieppois Eugène Bénet fut placée sur l'esplanade nord, face à la mer.
Gravure ci-dessus : source gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France
Enfin pendant la seconde Guerre Mondiale, lors de la construction du mur de l'Atlantique, le château servit de nouveau de place-forte : le système défensif fut alors constitué de murs et de blockhaus, venus renforcer les murailles et enceintes du château.
Le château abrite ainsi depuis 1923 une des plus riches collections d'objets et sculptures en ivoire de France. » [2]« Construite au 15e siècle en grès et silex et remaniée plusieurs fois, la porte dite des Tourelles est constituée d'un passage voûté, flanqué de deux tours circulaires que couronnent deux toits coniques. Cette porte est la seule subsistante des sept anciennes portes de la ville, dont cinq donnaient sur la mer. Elle constitue avec le château et le mur de rempart près de l'ancienne tour aux Crabes, un des derniers vestiges des fortifications de la ville. Celles-ci furent édifiées sans doute dès le 11e siècle puis régulièrement reconstruites pour finalement être détruites au 19e.
Photos ci-dessus de Gilloudifs 2022.
Au cours des siècles, les Tourelles portèrent plusieurs noms dont porte du Dieppe port d'Ouest et servirent de prison, sans doute depuis la fin du Moyen Age jusqu'en 1825, date à laquelle les prisonniers furent transférés dans la nouvelle prison construite au Pollet, à l'emplacement du couvent des Capucins.
Après avoir appartenu à des particuliers, les tourelles abritent aujourd'hui le siège de l'association chargée du festival international des cerfs-volants qui se tient à Dieppe tous les deux ans depuis 1980. » [3]
La tour aux Crabes
« Les premières murailles de Dieppe détruites, la ville est restée sans défense entre 1195 et 1345, date à laquelle le roi Philippe de Valois autorise la construction de nouvelles fortifications. Le quai. s'arrêtait alors au niveau de l'actuelle rue de la Rade. Le bout du quai était constitué d'un poulier, butte naturelle de galets ramenés par la marée. En haut de la butte, il y avait un moulin à vent et, au Sud, un phare signalant l'entrée du port. Les noms actuels-des rues évoquent ce passé : place du Moulin à Vent, rue de la Lanterne.
Photo à droite extraite du PDF http://eprints2.insa-strasbourg.fr/1562/1/LE_MOUEL_Chloe_Memoire_PFE2013ok.pdf
La muraille a été construite le long du chenal, au pied de cette butte. La tour aux Crabes, placée à l'angle Sud, servait à protéger l'entrée du port. Il s'agissait d'une tour carrée de 9,20 m de côté, 11,25 m de haut et dont les murs étaient épais de 1,40 m. Le premier étage était voûté. On y accédait par un escalier en vis pratiqué dans l'épaisseur du mur. Celui-ci débouchait au dernier étage sur la terrasse entourée d'un mur garni de meurtrières, sous l'une des deux guérites en pierre qui surmontent les angles côté Sud. C'est depuis cette terrasse que l'on pouvait accéder à la place d'armes. Des fenêtres ont été ajoutées par la suite, au gré des réparations successives. La possibilité de l'existence d'un souterrain entre la tour et le moulin à vent ou le château pour le repli des troupes a été évoquée, mais il n'en existe aucune trace aujourd'hui.
Le nom d'origine de cette tour est tour du Pollet, du nom du quartier où elle se trouvait. Elle a pris le surnom de tour aux Crabes car, ayant les pieds dans l'eau, ces crustacés restaient accroché à ses murs à marée basse.
La tour a joué un rôle majeur dans la défense de la ville en 1442 contre les anglais. Mais elle a subi de nombreux tirs et devra attendre plus d'un siècle pour être réparée. A cette occasion des armoiries y sont apposées. Elle jouera ensuite un rôle mineur en 1589, encore contre les anglais. Lors de la visite du roi Louis XIII à Dieppe en 1617, un feu d'artifice est tiré depuis la terrasse de la tour.
A la fin du 17e siècle une ordonnance royale permet de détruire les forts et forteresses qui tombent en ruine. Les murailles de Dieppe ne sont plus utiles et sont tombées en désuétudes. Les dieppois s'approprient la muraille et s'installent sur les emplacements à l'abandon. En 1696 un édit royal constate cet usage et l'autorise. M. De St Victor fait de la place d'arme son jardin. L'escalier qui mène à la ruelle Beauregard prend alors le nom de marches St Victor.
En 1755 la muraille est réparée en vue de nouveaux combats, la rivalité maritime et coloniale de la France et de l'Angleterre s'étant rallumée. Il est particulièrement question de combler une brèche près de la tour par laquelle «trente hommes de front pouvaient pénétrer la ville». Les combats attendus n'ont eut lieu qu'en mer.
La caserne présente sur le site a été construite au cours du 18e siècle et utilisée principalement pour du stockage militaire. La charpente de la caserne était bien plus haute qu'actuellement. Des traces d'incendie sont d'ailleurs visible au dernier étage.
La tour est détruite en août 1841. Il ne reste que le mur de soutènement. Tout l’intérieur de l’édifice a été empli de remblais. Plusieurs plaques commémoratives y ont été apposées, comme celle de Louise-Michel, revenue de déportation de la Nouvelle-Calédonie en 1880. » [4]
Photos de la tour aux Crabes, photos de Gilloudifs.
Sources :
[1] http://www.stejeannedarc.net/dossiers/itineraire_jda_normandie.php
[2] http://www.dieppe.fr/menus/decouvrir-dieppe-2/le-patrimoine-architectural-2
[3] http://www.dieppe.fr/menus/decouvrir-dieppe-2/le-patrimoine-architectural-2/les-tourelles-84
[4] http://eprints2.insa-strasbourg.fr/1562/1/LE_MOUEL_Chloe_Memoire_PFE2013ok.pdf
[5] Wikipédia
Bonnes pages :
O http://www.visites-p.net/gravure-ancienne-du-jour/normandie-dieppe-19eme.html
O http://books.openedition.org/puc/9448
O http://www.chateauxfaure-et-faureteresses.com/dieppe.html
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Le 2 août 1589, le roi Henri III ayant été assassiné, le protestant Henri de Navarre accède au trône. Mais les ligueurs refusent de le reconnaître. Chassé de Paris, il concentre ses troupes et son attention en Normandie au plus près de ses alliés Anglais. Cette gravure extraite du site, http://www.rouen-histoire.com/HenriIV/index.htm est d'origine allemande. 11 février 1590 : Le contrôle de la ville de Dieppe est essentiel pour Henri IV. Elle permet des liaisons faciles avec ses alliés Anglais. Le duc de Mayenne, chef des ligueurs, pense le vaincre facilement. Il met le siège devant Dieppe. Une série de batailles (du 13 au 28 septembre) autour de la ville et d'Arques (qui devient Arques la Bataille à cette occasion) le met en déroute, obligé de se replier en désordre vers Paris. Henri mettra le siège devant cette ville, mais il échouera. La géographie ici n'est pas respectée : Dieppe est représentée à l'envers...
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