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LES REMPARTS DE BELLENCOMBRE (Seine-Maritime)
Située dans la haute vallée de la Varenne en aval de Saint-Saëns (Normandie, Seine-Maritime) à mi-chemin entre Rouen et Dieppe, la commune de Bellencombre possède les vestiges d’un château médiéval dit à motte et laissé à l’abandon depuis des siècles.
Le château de Bellencombre a été construit aux 11e-12e siècles dans la vallée de la rivière Varenne par les Warenne qui devinrent comtes de Surrey après la conquête de l'Angleterre en 1066. Il est réparé pour Jean-sans-Terre vers 1200. Il est endommagé pendant la guerre de Cent Ans et par Charles le Téméraire en 1472.
Démembré à partir de 1833, le château fort est à l'état de vestiges vers 1845. L'église qui était située dans l'enceinte est détruite en 1866 et son cimetière déplacé. [NdB]
Ci-dessus, l’ancienne église de Bellencombre dans la basse-cour du château vers 1832 d’après un dessin de l’anglais M. A. Lower. Document extrait du site https://chateau-de-bellencombre.com/les-eglises-de-bellencombre/
" A Bellencombre, il reste les bases des deux tours d’entrée de la haute-cour, des fractions de murs plus au moins hauts de cette dernière et surtout le mur de silex en relativement bon état de la basse-cour (environ 6 m de haut) se greffant sur la haute-cour avec encore trois meurtrières dont une intacte. Au niveau de la basse-cour subsistent côté ouest une tour et peut-être même une seconde encore envahie complètement par la végétation. Les fossés impressionnants font par endroits 10 m de profondeur. Dans la partie inférieure de la basse-cour, les murs ont totalement disparu. Il reste très peu de vestiges de l’enceinte fortifiée qui ceinturait le bourg. " [7]
Ci-dessus, photos extraites de https://chateau-de-bellencombre.com/
Plan hypothétique du site du château de Bellencombre (à améliorer sans doute) ; blason de la famille Warenne par SanglierT - Eigenes Werk, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=17666253
Extérieur et intérieur du château en 1832, gravures, dans la revue de Rouen et de Normandie, 1852,
1842 : « Ce château, fort important dans l'origine, mais dont on ne voit plus aujourd'hui que les dernières traces, avait été pris par les Anglais en 1418, repris par les Français en 1449, et brûlé en 1472 par Charles le Téméraire, duc de Bourgogne. Reconstruit dans les premières années du 16e siècle, il joue encore un certain rôle dans les guerres de Henri IV avec les Ligueurs. Le mamelon sur le sommet duquel s'élevait le donjon domine à une grande distance la vallée de Bellencombre. L'enceinte de ce château était très-vaste, et d'immenses fossés, de près de quarante pieds de profondeur, le défendaient sur tous les points où l'escarpement du coteau n'offrait pas une défense naturelle. Ce n'est guère que depuis quatre ans, que ce curieux monument des siècles passés a été attaqué par la main des hommes. En 1833 ; il était encore dans un état complet de conservation (...)
Le terrain compris dans le vaste cercle des murs du château, terrain qui comprend tout à-la-fois l'église, le cimetière, et une grande partie du bourg de Bellencombre, est également fécond en antiquités, et notamment en objets du moyen-âge. En défrichant le cimetière, il a été trouvé différentes monnaies de Henri V, roi d'Angleterre et soi-disant roi de France. » [1]
Ci-dessus, une photo extraite d'un site néerlandais très complet et fort bien documenté sur les mottes en Europe dont celles de Normandie : http://www.basaarts.nl/vraagbaak.php
Ci-dessus, à gauche, plan extrait du cadastre napoléonien ; à droite, une vue aérienne extraite du site Géoportail
1850 : « Ce n‘est plus aujourd’hui qu’un simple chef-lieu de canton que ce Bellencombre qui fut autrefois une puissante châtellenie, fondée aux premiers jours de la féodalité, et qui compta de rudes combats et de vaillants capitaines. Les sires de Varenne et de la Heuze, les de Moy et les Fontaine-Martel, ont noblement soutenu l'honneur du drapeau qui flottait sur ces tourelles guerrières. Bâti par des mains normandes, ce vieux château défendit valeureusement le dernier de nos ducs. Jean-Sans-Terre en avait fait réparer les brèches, creuser les énormes fossés et garnir les remparts arbalétriers, qui hélas ! furent impuissants contre les soldats de Philippe-Auguste. En 1203, le château de Bellencombre dut céder au vainqueur de Bouvines, comme l‘avaient fait Radepont, Roche-Orival et Moulineaux, construits par le duc-roi des Anglo-Normands. Au 15e siècle des bruits de guerre retentissent de nouveau autour de ces fières murailles. Le léopard anglais les escalade en 1418 semant sur le sol le nom d’Arundel qui s‘y trouve encore (près de Bellencombre est le camp d'Arundel) : Mais le drapeau blanc de Charles Vll y remonte en 1449. En 1472, c'est le terrible Charles le Téméraire qui enveloppe tout dans un océan de flammes. Les trois couleurs de la Sainte Union Catholique flottèrent aussi sur la forteresse de Fontaine-Martel, ce vaillant chef des ligueurs cauchois. Mais ce furent les derniers jours de gloire, car depuis ce temps un silence éternel s’est fait autour des murs.
Je me trompe, depuis 1833, époque de sa vente définitive par les Godard de Belbeuf, le pauvre château de Bellencombre entend des bruits étranges : c’est le sourd retentissement du marteau et de la pioche des démolisseurs. Le père Dillard, qui a acheté 8 000 fr. ce vieux tronçon de la France chevaleresque, s‘acharne à sa ruine comme le ver qui ronge un cadavre. Il le démolit pièce par pièce, morceau par morceau ; il le vend en détail. Il convertit en gros sous chacune de ses pierres. Il fait du ciment avec sa tuile et vend comme du sable l’éternel mortier de ses murailles, de 7 mètres d’épaisseur. Le donjon et les tours du portail ont disparu sous ses coups, les arches du pont ont croulé dans les fossés, et pourtant du haut de ce mamelon, dressé de main d‘homme, l’œil commande encore fièrement la vallée et la forêt d‘alentour.
Peu de ruines nous ont plus intéressé que celles de Bellecombre. Ces remparts ébréchés par le temps, ces pans de murs couverts de lierre, ces fossés remplis de broussailles, ces gouffres creusés jusques au-dessous de l‘église, cette vieille enceinte qui s‘avance dans le bourg qu’elle enfermait jadis, tout cela nous a reporté au moyen-âge, et nous nous sommes cru un instant sous le règne de Guillaume ou de Saint Louis, au sein de la France féodale. Quel malheur que cette physionomie d‘un vieux bourg fermé comme ceux des bords du Rhin, ait disparu du milieu de nous ! Ce serait un curieux spectacle, au milieu de l’élégance et du confort de notre civilisation moderne, que ce rude jouteur resté les armes à la main, avec ses allures de guerre, sa cotte de mailles et son masque de fer. Il y aurait toute une méditation philosophique à faire sur ces sombres voûtes, ces étroites visières, ces cachots profonds. ces longs et muets souterrains, comparés avec nos usines si claires et si élégantes, nos ateliers si brillants et si animés, nos palais de l'industrie si vivants, si spacieux, si aérés, si transparents.
Dans son enceinte fossoyée, le château de Bellencombre renferma jadis l’église, et la tour du clocher n‘était qu’un auxiliaire et une rivale du donjon. Les bords du Rhin nous offrent constamment un spectacle analogue. Là, comme à Bellencombre, c’est une pyramide percée de cintres romans qui s’élève sur les transepts et qui domine le bourg d‘une façon austère et mystique. L’église de Bellencombre a beaucoup souffert du voisinage du château. Les deux transepts ont été détruits. Le chœur et la nef, qui ont échappé , sont tuffeux et cintrés comme au 11e siècle. Cette construction, toutefois, est rude et sauvage ; elle sent la main des hommes armés qui l’ont élevée pendant la Trêve de Dieu. » [2]
Gravure ci-dessus : photocopy of Bellencombre Castle given to us by lady of Presbytery a drawing by P. Atunx. The castle Bellencombre was built in 11th century, altered with 16 th century, was dismantled in 1833/35.
1851 : « On voyait au château de Bellencombre, en 1833, deux grandes tours de grès, de formes assez sveltes, dont l'hémicycle extérieur était parfaitement conservé ; les créneaux existaient encore, et plus haut quelques arbres, fixés comme des panaches à la place des anciens drapeaux, ondoyaient au souffle des vents. Entre ces deux tours d'entrée, semblables à deux sentinelles vigilantes, on remarquait deux larges rainures d'une grande longueur, qui servaient jadis à soulever le pont-levis, puis une ouverture assez élevée pour que les hommes d'armes ne heurtassent point le cimier de leurs casques, mais néanmoins assez basse relativement aux dimensions perpendiculaires de la muraille supérieure pour qu'elle parût gémir sous sa masse; puis, tout auprès, une autre ouverture fort petite et de forme ogivale. Voilà quel était l'aspect de l'entrée du château de Bellencombre du côté opposé au bourg. A quelques pas, la mousse s'était entièrement emparée d'un mur, et tellement qu'on ne pouvait y soupçonner l'existence de la pierre. L'auteur du Voyage dans le département de la Seine-Inférieure vit au château de Bellencombre les bascules des deux ponts-levis encore sur place et très mobiles : celle du petit pont était pourvue de sa chaîne ; de gros massifs de maçonnerie lui faisaient penser qu'il y avait eu des portes aux principales entrées du bourg. Quand les yeux plongent dans la profondeur des fossés de Bellencombre, l'esprit comprend toute l'ancienne importance de ce point fortifié. Certains châteaux, même du premier ordre, celui d'Arques, par exemple, n'offrent plus autre chose que des masses de cailloux informes et quelques traînées de briques, qui leur communiquent des tons chauds : on voyait à Bellencombre des pierres taillées et jointes ensemble par un ciment des plus solides. La spéculation entrevoyait une fortune, et convoitait cette proie, de même que le ver du tombeau convoite le cadavre : espérance hideuse ! Mais cette fortune a coûté des sueurs avant que le spéculateur eût recouvré même le prix de l'acquisition. Ces pierres, amoncelées jadis pour la gloire, et qui formaient le sanctuaire domestique de l'honneur des Varenne et des La Heuse, servent maintenant à construire des chaumières et des étables, à protéger les animaux domestiques contre les intempéries, tandis que les ombres des preux perdent l'abri de ces nobles remparts. Si les tours de grès de Bellencombre fussent tombées dans un jour de combat, à la suite d'une mêlée sanglante, et que leurs débris jonchassent le terrain d'alentour, nous en approcherions non seulement avec respect, mais avec un vif enthousiasme : on éprouve ce sentiment en présence du cadavre d'un Hector renversé par un Achille. Les murailles de Bellencombre, démolies froidement et par amour du lucre, donnent maintenant de la tristesse à celui qui les considère, et, quoique beaucoup de forteresses aient éprouvé un sort de ce genre, quoique les rois, à certaines époques, aient donné des autorisations pour emporter leurs matériaux, le fait est du nombre de ceux qu'on déplore ; les monuments historiques sont toujours bons à conserver; quand ils ne peuvent plus continuer leur rôle, ils peuvent parler de celui qu'ils ont joué auparavant et dans leurs années de splendeur. Bellencombre avait beaucoup à dire : le château de Torcy, dont on rencontre l'emplacement à quelques kilomètres, avait également beaucoup à dire ; l'un et l'autre sont regrettables. » [3]
Photos ci-dessus extraites de http://www.warrenfamilyhistory.com/Docs/Bellencombre%20and%20la%20Varenne%20River%202006-2007.htm
Bellencombre, 1864 :
" C’est sans doute à l’époque franque, ou tout au plus tard à la période normande, qui chez nous lui est contemporaine, que l’on doit faire remonter l’origine du vieux château de Bellencombre. Cette vieille forteresse, qui dut porter primitivement le nom de Warinna, est assise sur une motte énorme encore entourée de terrassements et de fossés profonds. " [8]
« Bellencombre, qui est au bord de la rivière Varenne devint le siège de la famille de Warenne en Normandie. (...)
Guillaume de Warenne ou de Varenne († 24 juin 1088), est l'un des compagnons de Guillaume le Conquérant dans sa conquête de l'Angleterre en 1066. Important baron anglo-normand, il est l'un des hommes les plus riches de l'Angleterre nouvellement conquise. Il est fait 1er comte de Surrey par Guillaume II le Roux peu avant sa mort. Il est aussi le fondateur d'une dynastie qui dominera le comté de Surrey jusqu'en 1347. » [4] Wikipédia
Pour plus d'informations voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Guillaume_Ier_de_Warenne
Un article et une photo extraits du Réveil du 13 septembre 2016 : https://actu.fr/normandie/bellencombre_76070/le-chateau-de-bellencombre-se-refait-une-beaute_4715342.html
[2016] " Le château de Bellencombre se refait une beauté
Les ruines du château de Bellencombre ne tomberont pas dans l’oubli. Une association a été créée pour nettoyer et mettre en valeur ce lieu. Le chantier durera des années.
« Aux premiers abords, il n’en reste pas grand-chose. Et pour cause, le château de Bellencombre est complètement envahi par la végétation. Mais quelques passionnés ont repéré son potentiel et ses impressionnantes ruines. Un travail de longue haleine qui n’effraie pas la dizaine de bénévoles de l’Association de sauvegarde du château de Bellencombre (ASCB).
La structure, bien que pas tout à fait officialisée, a déjà commencé le travail. En juillet, les membres se sont réunis pour faire le point. Le 22 septembre, une nouvelle rencontre se tiendra dans l’Eure, à Monfort-sur-l’Isle « parce qu’il y a un château contemporain, qui était dans le même état d’abandon et qui a été complètement restauré. Nous voulons nous servir de leur expérience pour faire la même chose», explique Lionel Gaudefroy. Une autre réunion est prévue en octobre avec les élus de Bellencombre.
Un chantier jeune pour le nettoyer ?
« C’est un travail de longue haleine. Cela va prendre des années à le nettoyer, annonce Lionel Gaudefroy. Le relief est très abrupt, notamment avec les anciennes douves. Et encore, il faut imaginer qu’à l’époque elles devaient l’être encore plus, de l’ordre de dix mètres de profondeur ». Les membres de l’association pensent surtout à un travail de débroussaillage, du moins pour commencer. « Il faut qu’on en discute », admet-il. D’autant qu’il est fort possible que le lierre soit la seule chose qui fasse tenir les pierres des murs. Lionel Gaudefroy pense faire appel à des jeunes : « Pourquoi pas un chantier jeune. Il en faudra à cause de la difficulté d’accès ». [6] [2016]
A proximité :
« Selon la tradition, le domaine de la Grande Heuzé aurait été fondé au 10e ou 11e siècle. Le logis daterait du 13e ou 14e siècle. Remanié à plusieurs époques: porte d'entrée première de la moitié du 16e siècle. Porche, baies et enduit de la façade postérieure à la deuxième moitié du 18e siècle. La chapelle Saint-Christophe mentionnée en 1234, est reconstruite au début du deuxième quart du 16e siècle, dédicacée en 1531. Un aveu de 1615 mentionne un manoir, des étables, un colombier, des granges, un pressoir et justice à deux piliers. A part le logis, ces bâtiments ont été détruits. » [5] Source Base Mérimée
Sources :
[1] Histoire des environs de Dieppe comprenant les cantons de Longueville, de Tôtes, de Bacqueville, d'Offranville, d'Envermeu et de Bellencombre - Alexandre Guilmeth - Berdalle de Lapommeraye, 1842 - 286 pages https://books.google.fr/books?pg=PA260&dq=Bellencombre+ch%C3%A2teau&id=AEMbAAAAYAAJ&hl=fr&output=text
[2] Extrait de Les Églises de l'arrondissement de Dieppe. Églises rurales par Jean Benoît Désiré Cochet - 1850 - 544 pages https://books.google.fr/books?id=m49dAAAAcAAJ&pg=PA395&dq=Bellencombre+ch%C3%A2teau&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwi-4pXijJDVAhWJJ8AKHYB6BikQ6AEILDAC#v=onepage&q=Bellencombre%20ch%C3%A2teau&f=false
[3] Extrait de la Revue de Rouen et de Normandie, Volume 19 Au bureau de la Revue de Rouen. 1851 https://books.google.fr/books?id=47dDAAAAYAAJ&pg=PA302&dq=Bellencombre+ch%C3%A2teau&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwi-4pXijJDVAhWJJ8AKHYB6BikQ6AEIIjAA#v=onepage&q=Bellencombre%20ch%C3%A2teau&f=false
[4] Extrait de Wikipédia
[5] Source Base Mérimée, culture.gouv.fr/culturepatrimoine http://www.culture.gouv.fr/public/mistral/merimee.fr
[6] https://actu.fr/normandie/bellencombre_76070/le-chateau-de-bellencombre-se-refait-une-beaute_4715342.html
[7] Extrait du site https://chateau-de-bellencombre.com/
[8] Extrait de La Seine-Inférieure historique et archéologique : époques gauloise, romaine et franque... P. 109 - par M. l'abbé Jean-Benoît-Désiré Cochet (1812-1875) Éditeur Derache (Paris) 1864 https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k32141851/f91.item.r=%22La%20Seine%20inf%C3%A9rieure%20historique%20et%20arch%C3%A9ologique%22
Bonnes pages :
O Une association a été créée en 2017 pour valoriser le site (Association de Sauvegarde du Château de Bellencombre – A.S.C.B.) et une convention a été signée avec la commune qui en est propriétaire en grande partie : https://chateau-de-bellencombre.com/
O http://www.warrenfamilyhistory.com/Docs/Bellencombre%20and%20la%20Varenne%20River%202006-2007.htm
O https://www.pressreader.com/france/le-r%C3%A9veil-de-neufch%C3%A2tel-pays-de-bray/20161013/281822873316036
... et pour infos complémentaires :
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