• LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)

    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure) LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure) LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)

     

          « Illiers-l'Évêque est une commune française située dans le département de l'Eure en région Normandie. Les habitants d'Illiers-l'Évêque sont des Illiens-Épiscopiens. (...) Le nom de la localité est attesté sous les formes Illiae 11e siècle, Hilleiae et Illeiae en 1157, Illais en 1217. » [6]

     

         " Illiers-l'Evêque. Enceinte et ruines d'un ancien château-fort, sur la commune d'Illiers. Vestiges de fondations romaines nombreux.
    Charpillon et Caresme - Dict. hist. de l'Eure, t. II, p. 403.
    Alman.-Ann. de l'Eure, 1916, p. 256. " [9]
     

     

         « Au sud-ouest de Mantes, la frontière entre Normandie et Ile-de-France épousait l’Eure ; dès la fin du 10e siècle, les ducs y créèrent un verrou notable, le château d’Ivry bientôt suivi par celui de Pacy. En face, le vaste territoire forestier allant de Mantes à Dreux, fut peu à peu défriché, et les lignages chevaleresques s’y firent une place ; lignages du Mantois, lignages du Drouais y établirent leurs pouvoirs. Mais curieusement, c’est d’Ivry que sortit le lignage qui finalement constitua une petite seigneurie transfrontalière, comprenant Bréval, Anet, Illiers-l’Evêque, et bien sûr Ivry, seigneurie dont les destinées s’arrêtèrent dans la décennie précédant la conquête royale de 1204. » [1]

     

         « Au Sud-Est du département de l'Eure, pratiquement à la frontière avec l'Eure-et-Loir, proche d'Evreux, Anet, Houdan, Dreux, Illiers s'était implanté le long du tracé primitif probable de l'ancienne voie antique d'Évreux à Dreux. Mentionné pour la première fois à la fin du 10e siècle, Illiers se fortifia au 12e siècle. » [2]

     

         « Illiers-l'Évêque, cité par Orderic Vital parmi les places que Henri Ier fit fortifier vers 1113, pour arrêter les incursions de Gervais de Châteauneuf. On la voit en 1120 entre les mains d'Ascelin Goël ; en 1157 dans celles de Simon d'Anet. Dans le traité entre Philippe-Auguste et Richard Cœur de Lion, Illiers est mentionné comme une des propriétés du roi de France sur les limites de la Normandie. » [3] 

     

    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)

     

     Plan hypothétique du château d'Illiers-l'Evêque d'après Les seigneurs d'Ivry, Bréval et Anet au 11e siècle et 12e siècle et leurs fortifications aux marches entre France et Normandie par Jean Mesqui http://www.mesqui.net/Articles_fortif/pdf/LES-SEIGNEURIES-ivry-breval-anet.pdf ou http://docplayer.fr/21789490-Et-leurs-fortifications-aux-marches-entre-france-et-normandie-jean-mesqui.html  Concernant les lettres en rouge sur le plan, voir le chapitre ci-après sur l'architecture ; Blason des Ivry(-Bréval), attesté à partir d'Ascelin Goël. Extrait de http://anet-ezy-ivry.blogspot.fr/2015/02/liste-des-seigneurs-divry.html

     

    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure) 

    Ci-dessus, photo extraite de Les seigneurs d'Ivry, Bréval et Anet au 11e siècle et 12e siècle et leurs fortifications aux marches entre France et Normandie par Jean Mesqui http://www.mesqui.net/Articles_fortif/pdf/LES-SEIGNEURIES-ivry-breval-anet.pdf ou http://docplayer.fr/21789490-Et-leurs-fortifications-aux-marches-entre-france-et-normandie-jean-mesqui.html

     

    Historique

     

    « Ancienne baronnie avec haute justice.

     

    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)     Le château fort d'llliers. dont les ruines existent encore, fut construit en même temps que celui de Nonancourt au 12e siècle, par Henri Ier, roi d'Angleterre, pour assurer ses frontières du côté de la France. Il a appartenu, en 1150, aux seigneurs d'Anet, à Philippe-Auguste, ensuite a la maison de Courtenay jusqu'en 1273, et enfin aux évêques d'Évreux, qui le réunirent à leur domaine temporel.

     

         On a trouvé à Illiers des médailles romaines, des monnaies gauloises, des tuiles et des marbres antiques, ainsi qu'un cachet en cuivre des seigneurs de Nonancourt, portant les armes de cette ville. » [4]

     

    Ci-dessus, photo extraite du site Google Earth.


         « Le village – sans doute modeste – d'Illiers s'était implanté le long du tracé primitif probable de l‟ancienne voie antique d'Évreux à Dreux. Celle-ci, venant de Jumelles, passait légèrement à l‟ouest du hameau de Beaufort; son tracé demeure dans le chemin venant de Jersey, puis devait franchir la Coudanne par un gué dans la zone marécageuse de fond de vallée, et rejoignait le tracé actuel de la RD 76 qui a repris celui de la voie antique jusqu'au Mesnil-sur-l'Estrée. Entre le hameau de Bois-Perrier (commune Chavigny) et Courdemanche, ce tracé rectiligne a été supplanté au Moyen-âge par un cheminement à peu près parallèle, happé par l'attraction du prieuré de Coudres, et les chemins entre les nouveaux lieux de peuplement et de commerce. » [2]


    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)     « Le site est mentionné pour la première fois à la fin du 10e siècle, lors de la donation de son église et de ses dîmes au chapitre cathédral de Chartres, par le chevalier Avesgaud, qui lui-même les avait reçus de la comtesse Leutgarde, épouse du comte Thibaud de Blois et veuve de Guillaume Longue Épée. On ignore la succession de ses seigneurs au 11e siècle, et la première certitude acquise des sources est la fortification du site par Henri Ier Beauclerc en 1112, dans le cadre de représailles contre Gervais de Châteauneuf, seigneur de Brézolles et Sorel. Le roi semble avoir rapidement inféodé du château et de la seigneurie, Ascelin Goël, seigneur de Bréval et d'Anet ; celui-ci fit donation de la chapelle construite dans le château à l'abbaye Saint-Taurin, sans doute de façon quasi immédiate, afin de contribuer à la mise en valeur économique et agricole du site. Mais il est probable qu'Ascelin ne détenait pas la totalité des droits sur Illiers ; en 1155 apparaît dans l'entourage de son petit-fils Simon d'Anet, le miles Morhier d'Illiers, fondateur de la famille des Le Drouais. Morhier le Drouais était héréditairement détenteur des droits seigneuriaux sur la localité limitrophe de Courdemanche. » [5]

     

    Ci-dessus Blason de la famille d'Illiers dessiné par O. de Chavagnac pour l'Armorial des As? Extrait de http://dechav.free.fr/armorial/blason.php?id=Illiers 

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    « Gaston Ier ou Guazon d'Avesgaud :

     

         Seigneur du Châtel d'Illiers (doute au sujet de l'origine de cette famille. Plusieurs documents semblent attester l'origine des d'Avesgaud à Illiers-l'Evêque alors que d'autres les situent à Illiers-Combray. Il semble néanmoins qu'il s'agisse d'Illiers-l'Evêque dans l'Eure), beau-frère et successeur d'Albert, (1050-1073), devient seigneur de Châteauneuf par sa femme, Frodeline de Dreux, dame de Thimert et de Rémalard dont il a plusieurs enfants : Hugues, Gasco, Robert (Seigneurs de Gallardon), Mathilde. Il semble avoir possédé les terres de Thimert : il construit le premier château de Châteauneuf (Castellum Novum) (motte féodale à Thimert, objet d'une lutte entre le duc Guillaume et le roi Henri Ier de France en 1058). Ses successeurs, Gervais Ier de Châteauneuf et son fils Hugues II semblent avoir possédé Illiers avant que la ville ne passe dans les mains des Seigneurs d'Anet. Le village voisin de Courdemanche semble quant à lui être resté aux mains de la famille au moins jusqu'en 1239. » [6]

     

    « Gervais Ier de Châteauneuf (1105-1140)

     

         Grand sénéchal de Philippe Ier, il épouse Mabile de Châteauneuf du vivant de son beau-père Hugues Ier et devient seigneur de Châteauneuf à sa mort en 1105 et jusqu'à 1140. En 1096 Gervais fut médiateur avec Richard de Montfort et Hugues de Montgommery entre Guillaume de Breteuil-sur-Iton et Ascelin Goël d'Ivry-Bréval qui se faisaient la guerre pour la possession du château d Ivry. Pour contrer ses incursions régulières, le roi d'Angleterre Henri Ier fit fortifier les places de Verneuil, d'Illiers-l'Évêque et de Nonancourt. Néanmoins, les excursions de Gervais en Normandie continuèrent et Henri Ier fit le siège en 1113 de la forteresse de Sorel qu'il emporta après quelques jours. Gervais perdit alors Illiers-l'Évêque (que reçut Ascelin Goël) et le Plessis-Saint-Remy qu'il avait fortifié. » [6]

     

         « Henri Ier Beauclerc est le troisième fils de Guillaume le conquérant. Il succède à son frère Guillaume le Roux en Angleterre puis s'empare de la Normandie en 1106 au détriment de son autre frère Robert. Il décide de renforcer la frontière sud-est de la Normandie, peu à peu grignotée par Gervais seigneur de Châteauneuf, aidé par les Montfort, c'est-à-dire indirectement par le roi de France. En 1113, il chasse Gervais construisant une fortification à Saint-Rémy-sur-Avre. Il assiège et détruit le château de Sorel, appartenant à Gervais et fait bâtir des fortifications à Nonancourt et Illiers-l'Evêque. En 1118, il fortifiera Verneuil-sur-Avre. Le roi réinstaure les droits de l'évêque d’Évreux et rattache de nombreuses terres et églises à l'église Saint-Taurin d’Évreux, au détriment de celles, « françaises », de Coulombs et de Chartres.


    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)     Illiers est sur la route Dreux-Evreux et le roi confie la seigneurie et le château à Ascelin Goël. A ce moment, on constate qu'Ascelin est un proche du roi, il est probable qu'il est se soit rallié à lui lors de sa conquête de la Normandie en 1106. La châtellenie d'Illiers est étendue (jusqu'à Croth) et semble composé de droits ducaux mais aussi seigneuriaux des Châteauneuf. En outre le duc-roi rend la seigneurie d'Ivry à Ascelin, mais on ne sait pas de quelle manière puisque le problème n'est pas réglé comme le prouve la suite des événements. » [7]

     

    Ci-dessus, blason des Ivry(-Bréval), attesté à partir d'Ascelin Goël. Extrait de http://anet-ezy-ivry.blogspot.fr/2015/02/liste-des-seigneurs-divry.html

     

    Sur Ascelin Goel voir ici.

     

    Guillaume I Louvel

         Guillaume est le second fils d'Ascelin. Après la mort de son frère aîné, il est seigneur d'Ivry, de Bréval, d'Illiers et d'Anet. Il semble qu'il récupère Anet. Il est possible qu'il n'ait reçu que Bréval en héritage puis qu'il ait capté l'essentiel des possessions ses frères à leur décès, reconstituant la majeure partie des biens de son père. Il épouse Mathilde, fille du comte de Meulan, ce qui montre sa place de grand seigneur dans cette partie du duché. Malgré sa participation à une révolte aristocratique contre le duc-roi Henri Ier, celui-ci lui donnera d'importants domaines en Angleterre, peut-être pour l'empêcher de « basculer côté français ». Il meurt âgé entre 1166 et 1170. (…)

     

         Simon d'Anet reçoit châtellenies d'Anet, de Bréval et d'Illiers-l'Evêque. Il est possible qu'il soit dénommé « d'Anet » (et non « de Bréval ») en hommage à son oncle croisé. En outre, le château et la ville d'Anet ont pu gagner en importance. Il fonda les commanderies tellières de Chanu avant 1189 et Prunay en 1190. Il donna la châtellenie de Bréval à son fils Jean de Bréval. Celui-ci semble pencher du côté du roi de France Auguste et fortifier son territoire, lequel est ravagé par le duc-roi en 1188. Jean de Bréval meurt en 1189. Son père Simon d'Anet meurt donc sans descendance en 1190. Philippe Auguste s'empare alors ses possessions au nom de son droit d'échoite (lui permettant de saisir les seigneuries en déshérence) mais aussi en dédommageant les héritiers, comme Robert IV d'Ivry. Au nom du même droit, Philippe Auguste s'emparera d'Illiers en 1199. » [7]

     

    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)     « Dès avant 1127, une grande charte de l'abbaye Saint-Père de Chartres signalait, parmi les nombreuses églises en sa possession, celle d'Illiers. En 1157, Simon d'Anet, seigneur de Bréval, d'Anet et d'Illiers, approuva une importante charte de l'évêque d'Évreux Rotrou, mettant fin à l'usurpation des églises d'Illiers au détriment, d'une part du chapitre cathédral, et d'autre part de l'abbaye Saint-Père, semblant indiquer qu‟il existait deux églises dans le petit village. L'usurpation avait été le fait de la famille du miles Gouffier, et de ses fils Pierre et Guillaume ; cette famille se maintint dans la région ainsi d‟ailleurs qu'à Illiers.

     

    Ci-dessus, photo aérienne extraite du site Géoportail.

     

         Après la mort de Simon d'Anet, Morhier le Drouais obtint en 1191, de l'Échiquier normand, un jugement en sa faveur concernant la possession de la maison-forte d'Illiers, contre un certain Guillaume d'Anet dont on ne connaît pas l'origine ; en janvier 1192, Richard Cœur de Lion confirma au camp de Jaffa ce jugement, et inféoda Morhier le Drouais de la maison-forte, sous seigneurie éminente de l'évêque d'Évreux. Il dispensa Morhier du remboursement des sommes dépensées par le roi Henri Ier pour la construction du château.

         Bien qu'Illiers ait été inclus dans les conquêtes françaises lors du traité de juin 1194, c'est encore Richard Cœur de Lion qui inféoda en 1198 Gadon Le Drouais, fils de Morhier, de la maison-forte, suivant les mêmes termes que son père. Cependant, Philippe Auguste, au plus tard après la conquête définitive de 1204, attribua à Guillaume du Fresne, miles normand rallié à la cause française, la moitié de la seigneurie d'Illiers, comprenant la maison-forte et les droits éminents sur l'autre moitié ; selon une plainte de 1247, il aurait marié Guillaume à une nièce bâtarde de Simon d'Anet et lui aurait assigné cette part comme ayant été détenue par Simon dans la seigneurie. Le petit-fils de Morhier contesta cette manipulation en 1247, prétendant que Morhier avait acheté la moitié de la seigneurie et la fortification de Simon d'Anet et en avait joui sa vie durant ; mais il n'eut pas gain de cause.

     

    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)     Les familles du Fresne et Le Drouais possédèrent donc en indivision la seigneurie d'Illiers, les premiers détenant en sus le château et la seigneurie éminente sur les seconds ; l'ensemble était tenu des évêques d'Évreux. Avant 1230, Guillaume II du Fresne échangea sa part avec Robert I de Courtenay, bouteiller de France, seigneur de Nonancourt et de Conches, qui devint ainsi le seigneur dominant d'Illiers, et inféoda en décembre de cette année-là Guillaume le Drouais, petit-fils de Morhier, de la moitié de l'indivision.

         Raoul de Courtenay, fils de Robert I, revendit cette part avec Nonancourt à son frère Robert, futur évêque d'Orléans, en 1247. Celui-ci la conserva jusqu'en avril 1271, date à laquelle il en fit don à son neveu Robert de Sancerre ; Robert de Sancerre la revendit avant la fin 1272 à son oncle Guillaume de Courtenay, frère cadet de Raoul et de Robert, et finalement à la fin de l'année 1273, ce dernier la céda lui-même à l'évêque d'Évreux Philippe de Chaource.

         Deux ans plus tard, celui-ci racheta à Philippe Le Drouais, héritier de Guillaume Le Drouais, la moitié d'indivision qui demeurait en ses mains. Le château et la seigneurie d'Illiers firent partie par la suite des possessions de l'évêché d'Évreux. (…) » [5]

     

    Ci-dessus, blason de la famille de Courtenay par Odejea, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=4147599

     

    Architecture

     

    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)     « Les restes du château d‟Illiers sont connus dans leur état des années 1900 grâce à une notice de Léon Coutil (1856-1943) (voir ci-contre, extrait de ce même article), ainsi que par une courte description de l'archéologue Louis Régnier (1865-1923) ; plus récemment, Astrid Lemoine-Descourtieux a retrouvé un croquis dû à Raymond Anet-Bréval-Ivry Bordeaux, du troisième quart du 19e siècle, représentant la motte, les restes d'une tour maîtresse qui la couronnait, ainsi qu'une petite tourelle dont les ruines subsistent encore aujourd'hui.

         On ne reviendra donc pas en détail sur la description du site, qui comprenait une motte circulaire (A), et dont une basse-cour annulaire (B) demeure encore parfaitement visible. La motte, encore fort impressionnante bien qu'elle ait été légèrement entamée au sud-ouest, portait une tour maîtresse dont on ignore le plan. La basse-cour (B), est une plate-forme isolée du plateau par un fossé, mais entièrement gagnée en remblai sur les modestes pentes de la vallée. Elle est aujourd'hui (2009) envahie d'une végétation dense au point d'empêcher toute mesure ; on remarque encore çà et là les témoins de la courtine maçonnée qui la ceinturait, flanquée à l'angle nord par une tour cylindrique massive (environ 8 à 10 m de diamètre extérieur) dont subsiste la maçonnerie en blocage sur deux mètres environ, noyée dans les ronces et les arbustes. Cette courtine était interrompue vers l'est par une tour-porte encore reconnaissable au début du siècle dernier ; il reste à proximité de son emplacement un pan de maçonnerie de blocage de silex de deux mètres de largeur pour quatre de hauteur.

         Le château possédait une chapelle donnée par Ascelin Goël à Saint-Taurin, mais sa localisation est inconnue. Il est intéressant de s'appesantir sur la structure générale, qui a été décrite comme une simple fortification à motte et basse-cour. Léon Coutil avait identifié vers l'ouest les terrassements, déjà en partie effacés, d'une plate-forme qu'il supposait et dessinait de forme triangulaire (D) ; par ailleurs, on reconnaît encore les traces d‟une autre plate-forme (C), qui pourrait cependant être adventice et plus tardive, liée à l'exploitation agricole.

         Cette plate-forme (D), improprement appelée « ravelin », doit être interprétée en fonction du cadastre ancien : or celui-ci révèle parfaitement un contour ovoïdal qui formait une seconde basse-cour orientée du côté du village.

         On note par ailleurs la présence au nord-est, au-delà de la limite du fossé, d'une zone boisée concentrique à cette limite ; une seconde ligne boisée existait plus loin, se démarquant assez nettement du parcellaire en lanières radiales. Enfin, pour terminer cette analyse de la structure fossile, on remarque la présence d'une succession de limites parcellaires formant une ligne courbe enveloppant l'ensemble, débordant à l'ouest de la place du village qui paraît bien significative d'un tracé, entrepris sinon achevé, de délimitation d‟une minuscule enceinte villageoise, dont la vocation était peut-être d'englober l'église.

         Il paraît assez évident que l'implantation de la fortification castrale a contribué à un total remodelage de l'occupation de l'espace. Le franchissement de la Coudanne a été placé sous son contrôle direct ; de plus il s'est accompagné de l'aménagement d'une retenue et d'un moulin accolé au pont sur le petit cours d'eau. Tant le moulin que l'étang sont mentionnés dans la donation faite par Ascelin Goël à Saint-Taurin après 1112 ; il n'est pas impossible qu'ils aient été aménagés en même temps que l'on bâtissait le château. Cette probabilité est d'autant plus forte que la donation prévoyait que, dans le cas où un tonlieu ou un péage serait institué, l'abbaye en aurait la dîme de plein droit : c'est la preuve que la valorisation du site était encore toute récente.

     

    Le château et la double seigneurie d’Illiers

     

    LES REMPARTS D'ILLIERS-L'EVÊQUE (Eure)     Une particularité insigne de cette fortification réside dans sa relation avec le découpage géographique administratif.

         En effet, le territoire communal de Courdemanche possède une protubérance marquée en rive gauche de la Coudanne, qui correspond assez exactement à la basse-cour (B) du site fortifié, à ses fossés et à une partie de la zone limitée par la frange boisée nord-est ; la limite intercommunale jouxte le moulin, mais place ce dernier entièrement dans le territoire d'Illiers. Cette protubérance du territoire de Courdemanche constitue de fait une véritable enclave, et l'on ne peut considérer sa découpe autour de la basse-cour orientale comme le fait du hasard, ou celui d'une bizarrerie administrative moderne intervenue au moment de la fixation des territoires communaux. Il s'agit certainement d‟une réminiscence d'un découpage ancien, que nous pensons remonter au partage en indivision de la seigneurie d'Illiers sous Simon d'Anet, au profit de Morhier le Drouais.

     

    Ci-dessus, plans extraits du cadastre napoléonien des communes d'Illiers-l'Evêque et de Courdemanche, Archives de l'Eure, http://archives.eure.fr/ 

     

         En effet, celui-ci était seigneur de Courdemanche en 1186 ; son petit-fils prétendit, sans que l'on sache si c'était de bon droit, que Simon d'Anet lui avait vendu la maison-forte et la moitié de la seigneurie.

         Quoi qu'il en soit de cette prétention, Morhier et ses successeurs possédèrent l'autre moitié de la seigneurie, à l'exclusion des droits éminents. Or le symbole le plus évident de ceux-ci était la possession de la motte et de la tour maîtresse, qui demeurèrent côté du territoire d'Illiers.

         Il est en définitive probable qu'une partition de la fortification, ainsi que du territoire et des droits sur Illiers, intervint entre la création de la fortification en 1112, et la première mention de Morhier d'Illiers en 1155. Cette partition eut pour effet d'affecter la basse-cour orientale (B), ainsi que le territoire afférent, au coseigneur secondaire d'Illiers, c'est-à-dire Morhier lui-même ; peut-être eut-elle pour effet d'entraîner la création de la basse-cour occidentale (D).

         La plainte de Guillaume le Drouais, en 1247, porta peut-être sur l'usurpation de cette basse-cour par le roi et Guillaume I du Fresne. » [5]

     

    « Frontière du pays chartrain.

     

         La petite rivière d'Avre, coulant pendant soixante-dix kilomètres dans une étroite vallée, entre les plaines de l'Evrecin et celles de la Beauce formait de ce côté un fossé naturel et délimitait la frontière d'une manière qui n'a jamais varié.

    Avra licet parva Francorum dividit arva.

         Les châteaux de Chênnebrun, Verneuil, Tillières et Nonancourt étaient bâtis sur les collines qui dominent cette rivière au nord et se trouvaient tous au passage de routes anciennes qu'ils interceptaient. Illiers-l'Évêque se trouvait un peu plus loin dans la plaine, sur la route de Dreux à Évreux. Dans plusieurs endroits où la rivière encore faible ne formait pas un obstacle suffisant, le roi Henri II avait fait creuser de longues lignes de fossés avec un rempart de terre. M. de Caumont les signale dans les communes d'Irai, Chênebrun, Saint-Christophe et Courleilles, où ils portent le nom de Fossés-ie-Roi. Il engage à les étudier dans leur ensemble et par rapport avec les forteresses voisines. A une dizaine de kilomètres en arrière, le cours de l'Iton et les châteaux de Bourth, Cintray, Condé-sur-Iton, Breteuil et Damville formaient une seconde ligne parallèle à la première. Une troisième consistait dans les trois fortes places de Laigle, Conches et Évreux, reliées par le cours de la Risle et par les forêts de Breteuil, de Conches et d'Évreux. Cette frontière fut rarement attaquée avec succès, et plus d'une fois, particulièrement en 1119, Breteuil fut le bouclier de la Normandie. » [8]

     

    Sources :

     

    [1] Extrait de https://www.yvelines.fr/agenda/seigneuries-et-chateaux-de-la-frontiere-franco-normande-aux-xie-et-xiie-siecles-conference-projection-par-jean-mesqui/

    [2] Extrait de http://maintenance-et-batiment.blogspot.fr/2017/05/fiche-historique-les-chateaux_8.html

    [3] Extrait de Le cinquantenaire de la Société archéologique d'Eure-et-Loir : 1906 14-27 mai, 31 mai et 2, 3 et 4 juin par la Société archéologique d'Eure-et-Loir ; Éditeur : Société archéologique (Chartes) ; Date d'édition : 1910-1926 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6561135x/f112.item.r=%22Illiers-l'Ev%C3%AAque%22.texteImage

    [4] Extrait de Histoire et géographie du département de l'Eure: aperçu géologique et minéralogique : commerce, industrie, agriculture, administration, statiques, caractères, moeurs, portraits, coutumes, monuments, antiquités, notices historiques sur les villes et les bourgs : biographies des hommes remarquables par Paul Rateau, J. Pinet, A. Blot, 1870 - 388 pages.

    [5] Extrait de Les seigneurs d'Ivry, Bréval et Anet au 11ème siècle et 12ème siècle et leurs fortifications aux marches entre France et Normandie par Jean Mesqui  http://www.mesqui.net/Articles_fortif/pdf/LES-SEIGNEURIES-ivry-breval-anet.pdf ou http://docplayer.fr/21789490-Et-leurs-fortifications-aux-marches-entre-france-et-normandie-jean-mesqui.html

    [6] Extrait de Wikipédia

    [7] Extrait de https://anet-ezy-ivry.blogspot.fr/2015/02/?view=classic

    [8] Extrait du Congrès archéologique de France : séances générales tenues... par la Société française pour la conservation des monuments historiques ; éditeur : Derache (Paris) / A. Hardel (Caen), 1876.

    [9] Extrait de l'article Camps, enceinte, mottes et fortifications antiques du département de l'Eure par le Dr Doranlo in le  Bulletin de la Société des antiquaires de Normandie – Éditeurs Derache (Paris) / Didron (Caen) / Hardel (Rouen) / Le Brument () 1919 - https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k200034x/f147.item.r=%22ferme%20de%20Cantepie%22# 

     

    Bonnes pages :

     

    http://www.mesqui.net/Page-d-accueil/page%20d-accueil_fran.htm

    http://www.mesqui.net/Articles_fortif/pdf/LES-SEIGNEURIES-ivry-breval-anet.pdf

    http://racineshistoire.free.fr/LGN/PDF/Bayeux-Ivry.pdf

     

    Bibliographie :

     

    Les seigneurs d'Ivry, Bréval et Anet aux 11e et 12e siècles : châteaux et familles à la frontière normande par Jean Mesqui ; préface de Vincent Juhel. Caen : Société des antiquaires de Normandie, 2011. 410 p. :

     

    Bonnes pages :

     

    http://racineshistoire.free.fr/LGN/PDF/Illiers.pdf

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