Un château de contes de fées
« Au milieu d'un parc paysager traversé de grandes allées avec pièces d'eau, fontaine, deux châteaux se répondent dans un face à face étonnant. Le château médiéval vous charmera de toute évidence comme il a charmé les évêques d'Evreux sous l'ancien régime. Orné de tours, créneaux, mâchicoulis, fenêtres à meneaux, ce véritable château de contes de fées abritent cheminées gigantesques, boiseries chaleureuses et escalier en colimaçon. Le château 19e, avec son air de "Petit Trianon", regorge de pièces aux décors uniques. Le parc, ses pelouses et ses jardins à la françaises dessinés par Achille Duchêne forment un écrin de verdure magnifique et apaisant. » [1]
« Le village de Condé-sur-Iton se situe à environ 26 kilomètres au sud-ouest d'Évreux, au sud du diocèse. Il s'est développé sur le versant ouest de la rivière Iton et sur le rebord du plateau calcaire qu'elle entaille. Celle-ci a constitué une très large vallée dans laquelle elle se divise en plusieurs bras divagants. (...) Condé est un site d'occupation très ancienne, un lieu de passage mentionné sur l'itinéraire d'Antonin et la carte de Peutinger, au carrefour de voies importantes en provenance de Lisieux et d'Évreux au nord, vers Dreux et Chartres au sud et au sud-est ; en outre, on a mis au jour, à Condé, les vestiges d'un cimetière gallo-romain. La dédicace de l'église, à saint Martin, pourrait être l'indice d'une christianisation précoce. » [2]
Plan hypothétique des châteaux de Condé-sur-Iton (en attendant mieux...) ; blason de Condé-sur-Iton par Chatsam — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=11183080
Photos ci-dessus : à gauche extraite de http://www.photo-paramoteur.com/photographies-aeriennes/normandie-eure/eure-chateaux-patrimoine/content/chateau-conde-sur-iton-25_large.html : à droite extraite de https://www.electro-gn.com/268-projetgntigndetailleinhabituelle
« Dans la seconde moitié du 12e siècle, cette bourgade avait été donnée par le duc de Normandie à l'évêque d'Evreux. Henri II Plantagenet confirma cette donation qui fut approuvée par le pape Luce, de 1181 à 1185. » [3]
« En 1190, Richard Cœur de Lion donna à la baronnie et au château de Condé le privilège d'un marché le samedi. » [4]
« Au siècle suivant, Condé fut érigé en baronnie ayant droit de haute justice. » « D'après un aveu du 28 mars 1400, la baronnie de Condé-sur-Iton s'étendait sur les paroisses de Condé, Séez-Moulins, Dame-Marie, Saint-Ouen d'Athez, Le Sacq et Mousseaux. On lit en outre dans le Coutumier des Forêts de Normandie : « Monsieur l'évesque d'Evreux a, en la forêt de Breteuil, à cause de son hostel de Condé, franchise de panage pour ses porcs, un chesne et un fou (c'est-à-dire un hêtre). Item un cerf et un sanglier pris aux dépens du roy et rendu à Condé et il doit rendre le cuir du cerf aux veneurs ou payer 5 s. »
Les évêques d'Evreux avaient, en effet, en ce lieu, un hôtel où l'archevêque de Rouen, Eudes Rigaud, coucha en 1260 ; mais, au commencement du 16e siècle, cette résidence était sans doute bien délabrée, car Gabriel Le Veneur, soixante-neuvième évêque d'Évreux, la remplaça, entre les années 1511 et 1532, par un château à tourelles... » [3]
« Ambroise le Veneur, évêque d'Evreux de 1514 à 1532, fit rebâtir le château de Condé, clore le parc de murailles en briques et renouvela les droits et privilèges de ses vassaux. Ce château, placé dans les environs d'Evreux, servit de maison de plaisance à ses successeurs... » [4]
« Parmi ces derniers, on remarque Guillaume Péricard, Jaques Davy du Perron et Potier de Novion, dont la présence au château est prouvée par divers actes qu'ils y ont signés. On assure même que Davy du Perron y a composé plusieurs de ses nombreux ouvrages théologiques ou littéraires, et l'on a conservé le souvenir de l'hospitalité qu'il y offrit à son ami le baron de Médavy après que celui-ci eut perdu son fils bien-aimé. » [3]
« Lorsque les affaires de l'Etat lui en laissaient le loisir, le cardinal Duperron affectionnait particulièrement le séjour de Condé. » [4]
« Condé fut aux 16e et 17e siècles propriété et résidence d’été des évêques d’Évreux. De magnifiques pièces d’eau donnent à ce domaine un aspect princier. Sur la rive gauche de l’Iton s’élevait le château restauré par Le Veneur, dans lequel coucha le roi Henri IV, la veille de la victoire d’Ivry. Sous la Révolution (1789), les évêques qui n’étaient plus en odeur de sainteté, furent exclus du domaine, et le château déclaré « bien national » fut mis en vente. » [5]
« En 1791, l'ensemble du complexe, espaces bâtis et non bâtis dont les bois et l'étang du fourneau, est vendu comme biens nationaux. » [2]
La propriété fut acquise comme « bien national » le 8 juillet 1791 par le sieur de Witt, ancien échevin d'Amsterdam dont la famille s'est alliée par la suite à celle du ministre François Guizot et dont descendent les frères Schlumberger (il est mort le 12 septembre 1809 à Condé-sur-Iton). Il transmit ensuite la propriété au sieur Gazzani père. (NDB)
« De 1812 à 1965, la propriété sera acquise tour à tour par trois riches familles. C’est aujourd’hui la propriété de la famille Borel. » [5]
Documents ci-dessus : à gauche plan extrait du cadastre napoléonien, 1829 : on voit l'emplacement du château Rochechouart à la place de l'actuel château Neuf érigé en 1889 ; à droite, une photo aérienne extraite du site Géoportail
Quatre châteaux, un domaine :
1. Le « Vieux château » est celui que l’on voit aujourd’hui encore, avec tours, échauguettes, créneaux, mâchicoulis, fenêtres à meneaux... A l’origine, il était entièrement entouré par les eaux de l’Iton. Il date du Moyen-âge, peut-être 15ème siècle, mais a été profondément restauré au milieu du 19ème siècle. » [5]
« Le château actuel est le résultat de restaurations drastiques, a la mode médiévale, entreprises vers 1845 sur les bâtiments déjà bien dégradés en 1722, et les modalités de cette restauration ont été précisées par R. Herval. » [2]
Il a été transformé dans le goût néo-classique en 1845 par l'homme d’affaires Alfred Mossselman, fils de banquier bruxellois. C'est l'architecte parisien Pierre-Charles Dusillion (1804-1878), propagateur du style néo renaissance en France, qui rénova le château.
En 1860 Alfred Mosselman vend son château de Condé-sur-Iton à sa sœur Fanny Mosselman, célèbre pour avoir été la maîtresse en titre du duc de Morny et l'épouse du premier ambassadeur de Belgique à Paris. [NdB]
2. Le château Renaissance : il ne reste rien de ce pavillon élevé par l’évêque d’Ambroise Le Veneur dans les années 1520-1530. Construit en brique, il s’élevait sur le versant droit de l’Iton. » [5]
« À partir de 1722, les évêques obtiennent du roi l'autorisation de détruire le vieux château en partie ruiné pour reconstruire un nouveau séjour sur le versant du coteau, dans des conditions topographiques plus agréables que le fond marécageux où s'élevait le château primitif. » [2]
3. Le château Rochechouart construit vers 1750, par l’évêque de Rochechouart (Pierre-Jules-César de Rochechouart, évêque d'Evreux de 1733 à 1753), à la place du manoir Renaissance. Cet édifice fut abattu en 1889 pour édifier le Château Neuf. [C'est celui qu'on voit, ci-avant, sur le plan du cadastre de 1829.]
4. Le « Château Neuf », de style Louis XIII, fut édifié en 1889 par le comte Jarnac. Il ne reste de celui-ci que le premier niveau, suite à des modifications importantes opérées en 1962 par son propriétaire Charles de Rohan-Chabot. » [5]
Il ne reste plus du Château Neuf que son premier niveau. Ses deux étages supérieurs ont été supprimés en 1962 car leur entretien coûtait trop cher à leur propriétaire ! (NdB)
Photo ci-dessus : le Château Neuf réduit à son seul premier niveau ; photo extraite du site http://www.domainedeconde.com/
« Le parc du domaine du château est recensé au titre de l'inventaire général du patrimoine (180 ha). C'est le paysagiste Achille Duchêne (1866-1947) qui a dessiné et réalisé ce parc au tout début du 20e siècle. » [6]
« L’Espace Naturel du Fourneau
L’Iton formait jadis un seul cours d’eau qui passait par Francheville, Cintray, Saint Nicolas d’Attez et Condé-sur-Iton. Il a été divisé au 12e siècle pour fournir de l’eau à Breteuil et Verneuil. Il forme d’ores et maintenant plusieurs branches : le bras forcé de Breteuil qui, après un parcours de 14 kilomètres, reprend, à Condé, son lit primitif et l’ancien lit de l’Iton, connu sous le nom de rivière morte. L’étang de Condé, utilisé autrefois pour l’industrie, est classé ZNIEFF en 1984 pour ses végétaux rares et sa zone de migration sur ilots boisés. Devenu impraticable pour les loisirs, en 2015, l’étang de Condé disparait pour que la rivière Iton retrouve son lit d’origine. Le site est classé Espace Naturel Sensible. » [5]
« Frontière du pays chartrain.
La petite rivière d'Avre, coulant pendant soixante-dix kilomètres dans une étroite vallée, entre les plaines de l'Evrecin et celles de la Beauce formait de ce côté un fossé naturel et délimitait la frontière d'une manière qui n'a jamais varié.
Avra licet parva Francorum dividit arva.
Les châteaux de Chênnebrun, Verneuil, Tillières et Nonancourt étaient bâtis sur les collines qui dominent cette rivière au nord et se trouvaient tous au passage de routes anciennes qu'ils interceptaient. Illiers-l'Évêque se trouvait un peu plus loin dans la plaine, sur la route de Dreux à Évreux. Dans plusieurs endroits où la rivière encore faible ne formait pas un obstacle suffisant, le roi Henri II avait fait creuser de longues lignes de fossés avec un rempart de terre. M. de Caumont les signale dans les communes d'Irai, Chênebrun, Saint-Christophe et Courteilles, où ils portent le nom de Fossés-ie-Roi. Il engage à les étudier dans leur ensemble et par rapport avec les forteresses voisines. A une dizaine de kilomètres en arrière, le cours de l'Iton et les châteaux de Bourth, Cintray, Condé-sur-Iton, Breteuil et Damville formaient une seconde ligne parallèle à la première. Une troisième consistait dans les trois fortes places de Laigle, Conches et Évreux, reliées par le cours de la Risle et par les forêts de Breteuil, de Conches et d'Évreux. Cette frontière fut rarement attaquée avec succès, et plus d'une fois, particulièrement en 1119, Breteuil fut le bouclier de la Normandie. » [7]
Sources :
[1] Extrait de http://www.directsalles.com/lieu/domaine-de-conde
[2] Extrait de Evêques aux champs (Les) : châteaux et manoirs des évêques normands au Moyen Age (11e-15e siècles) ; Publication Université Rouen Havre, 2008.
[3] Extrait de La Normandie monumentale et pittoresque..., article de Jacques Lestrambe dans Eure, 1re partie. Éditeur : Lemale (Le Havre) Date d'édition : 1896 .
[4] Extrait des Mémoires et notes pour servir à l'histoire du département de l'Eure: Recueillis et publiés sous les auspices du Conseil Général et de la Société Libre d'Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres de l'Eure par M. M. Leopold Delisle et Louis Passy par Auguste Le Prévost ; Aug. Hérissey, 1862
[5] Extrait de http://www.normandie-sud-tourisme.fr/wp-content/uploads/2016/06/le-fourneau-de-cond%C3%A9-PR.pdf
[6] Extrait de Wikipédia
[7] Extrait du Congrès archéologique de France : séances générales tenues... par la Société française pour la conservation des monuments historiques ; éditeur : Derache (Paris) / A. Hardel (Caen), 1876.
Bonne page :
Aujourd'hui, le domaine de Condé-sur-Iton propose à la location des salles de réception, des chambres d'hôtes et des salles de réunion ; site officiel du château : http://www.directsalles.com/lieu/domaine-de-conde
Voir clip vidéo ci-dessous :